MARIE CLARISSE

La gardienne de la mer

AMP Ankivonjy - Ambanja, Région Diana

Grande défenseure des océans dans la région de Diana

« Défendre l’océan est une tâche difficile, surtout pour les femmes. Mais je suis convaincue que si vous nous donnez le pouvoir de décision, nous changerons le monde. »

Ce sont les mots de notre grande défenseure des océans dans la région de Diana, Marie Clarisse, qui se consacre à la protection des mangroves locales depuis plus de 5 ans. Elle se consacre particulièrement aux mangroves et à leur restauration. Membre du Comité de Contrôle et de Supervision des mangroves (CCS) et affiliée à l’AMP (Aires Marines Protégées) d’Ankivonjy, elle se démarque dans son domaine car elle travaille majoritairement avec des hommes. Voir une femme se consacrer à cent pour cent à la protection des océans ne peut qu’être inspirant.

Et au cas où ces informations seraient nécessaires, les CCS sont créés pour réduire les infractions à l’exploitation des ressources marines et sont généralement soutenus par des agences gouvernementales et des ONG, tandis que les AMP sont des zones marines délimitées soumises à des réglementations spécifiques conçues pour conserver les écosystèmes qui leur sont liés.

Lorsque nous avons interrogé Marie Clarisse sur les raisons pour lesquelles elle se consacre autant à la protection des mangroves, elle a répondu :

« J’ai vu la beauté ancienne de notre mangrove et aujourd’hui je suis témoin de sa dégradation. Maintenant, je fais tout ce que je peux pour ramener cette beauté et c’est vraiment satisfaisant de voir que les efforts que vous consacrez à quelque chose portent enfin leurs fruits. Si je le pouvais, je consacrerais toute ma vie à protéger les mangroves, car ce qu’elles font pour l’humanité est tout simplement incroyable. »

Marie Clarisse parle fièrement du pouvoir des mangroves. Parmi leurs nombreux rôles, elle mentionne particulièrement la protection des habitations côtières contre les vagues océaniques, la purification de l’air et, surtout, le formidable patrimoine qu’elles offrent aux générations futures.

Et maintenant la partie intéressante, comment contribue-t-elle à protéger la mangrove locale ? Elle a décrit son travail de patrouilleuse et les dangers d’en être une, surtout si vous êtes une femme.

« Nous planifions deux patrouilles par semaine. Parfois, nous attrapons les braconniers, parfois non. Lorsque nous le faisons, nous les amenons au KMD » (Comité chargé de l’Application du Dina).

Les KMD sont des comités chargés de punir ceux qui détruisent l’écosystème marin.Ils appliquent le « dina », terme malgache désignant un ensemble de règles ou de lois établies par une communauté. Il s’appuie souvent sur des traditions ancestrales et est mis en place pour garantir la justice, y compris la justice environnementale au niveau local.

Pour poursuivre la description de son travail, Marie Clarisse ajoute : « En tant que femme, c’est un métier assez dangereux car on ne fait pas peur aux malfaiteurs, mon propre mari est même contre le fait que je continue ce métier. Un autre risque que vous prenez lorsque vous décidez de devenir patrouilleur est qu’à tout moment de la journée, vous devez agir si quelqu’un vous prévient qu’il a surpris un acte de coupure de mangrove. À ce moment-là, vous devez abandonner tout ce que vous faites et aller voir ce qui se passe. La plupart du temps, je fais le ménage quand cela arrive, et cela ne plaît pas forcément à ma famille. »

Malgré ces aspects du métier, Marie Clarisse assure qu’elle n’abandonnera jamais son métier et qu’elle continuera à protéger l’océan aussi longtemps qu’elle le pourra. Elle déclare que les forêts de mangrove protègent tout et tout le monde en bord de mer et doivent être préservées à tout prix.

Lorsque nous lui avons demandé de transmettre un message au monde, elle a souhaité s’adresser spécifiquement à trois types de personnes : les braconniers des océans, les défenseurs des océans et les femmes.

Son premier message s’adresse spécifiquement à ceux qui détruisent l’écosystème marin:

« Je pense que tout le monde sait ce que je veux leur dire, c’est d’arrêter de faire du mal à notre océan. Ils pensent que les ressources marines sont infinies, mais ce n’est certainement pas le cas, du moins plus maintenant. Rien d’autre que l’homme n’est à l’origine des problèmes environnementaux actuels et si nous continuons à endommager nos ressources naturelles, nous ne laisserons rien aux générations futures. Comme vous le savez déjà, j’aime particulièrement les mangroves. Pourquoi les gens continueraient-ils à le détruire ? Les mangroves sont les murs qui protègent nos maisons des tempêtes tropicales, elles nous donnent de la nourriture, de l’air frais et elles sont magnifiques ! Bien sûr, elles peuvent être exploitées, mais pas de manière imprudente. Mon message aux malfaiteurs est donc de penser à leurs enfants et à leurs petits-enfants. Personne ne veut que ses descendants meurent de faim. »

Le deuxième message de notre héroïne des océans était fièrement adressé aux défenseurs des océans :

« Il ne suffit pas de protéger, il faut reconstruire. Je sais que protéger est déjà un métier difficile, mais quand on fait quelque chose, il faut le faire parfaitement et jusqu’au bout. Si nous nous contentons de défendre nos océans en arrêtant les malfaiteurs, nous ne ferons que ralentir l’extinction de nos ressources. C’est pourquoi nous devons reconstruire, notamment en reboisant autant que possible. Encore une fois, cela semble difficile, mais une fois que vous percevez réellement les gains de vos efforts, plus rien ne peut vous arrêter. »

Le dernier message de Marie Clarisse était dédié à toutes les femmes qui exercent un « métier d'homme » :

« Défendre l’océan est un travail difficile, surtout pour les femmes. Mais je suis convaincue que si vous nous donnez le pouvoir de décision, nous changerons le monde. Les gens ne craignent pas particulièrement les hommes, ils craignent tous ceux qui détiennent le pouvoir. Et chacun, quel que soit son sexe, a le droit d’accéder au pouvoir. Je fais toujours de mon mieux pour inspirer les femmes de ma communauté et je peux dire avec fierté qu’elles sont nombreuses à défendre actuellement l’océan. Mon message à toutes les femmes courageuses est assez simple : devenez une femme que tout le monde est forcé de respecter. »